Introduction (1er février)
Propulsé favori de la présidentielle au soir de sa victoire-surprise à la primaire de droite, François Fillon (né au Mans en 1954, 63 ans en 2017) est désormais dans la tourmente. Sa mauvaise passe commence dès janvier 2017, avec des sondages qui le placent certes toujours en position qualificative pour le second tour, mais dont la tendance est à la baisse. En cause : le tir nourri subi par son programme (coupe dans la sécurité sociale, réduction du nombre de fonctionnaires, augmentation du temps de travail) qui, s’il a séduit les votants de la primaire de la droite, inquiète une grande part de l’électorat et oblige le candidat à parfois atténuer certaines de ses propositions. Cette turbulence n’est toutefois rien en comparaison avec la tourmente qui s’abat à partir du 24 janvier et la révélation du Penelopegate. Pour Fillon, l’effet est dévastateur : c’est tout simplement un des piliers de sa candidature (sa probité, son honnêteté, qu’il a amplement mis en avant lors de la primaire pour se différencier de Nicolas Sarkozy) qui menace de s’effondrer et détruire l’édifice qu’il a construit en prônant l’austérité et dénonçant l’assistanat et tous ceux qui profitent éhontément de l’argent public.
Le candidat des Républicains peut-il s’en sortir et remonter la pente ? Pour l’heure, sa défense ne plaide pas en sa faveur, et s’il répète que rien ne le fera renoncer, les coulisses bruissent de rumeurs sur un possible remplaçant. Le contrôle de Fillon sur l’appareil LR et sur les finances de campagne lui permet toutefois de garder pour un temps au moins le contrôle de son destin. Son plan va vraisemblablement être de dénoncer un complot et jouer la montre en espérant que l’affaire se tasse, bien que le caractère feuilletonnesque que le Canard enchaîné cherche à lui donner implique que de nouvelles révélations gênantes pourraient surgir. Mais plus encore, son sort (outre les développements judiciaires de l’affaire) dépendra grandement de la nature indéfectible ou pas de sa base électorale. Dans cette élection décidément indécise et où nombreux sont les candidats susceptibles de se neutraliser, une petite vingtaine de pourcents au premier tour peuvent suffire pour se retrouver face à Marine Le Pen au second. Encore faut-il pour cela les obtenir ne pas voir un autre candidat s’envoler, Macron en particulier, lequel a désormais le vent en poupe.
Sur son passé : fermement établi dans son fief de la Sarthe (il en sera parfois simultanément député et sénateur, ainsi que maire de Sablé-sur-Sarthe et président du conseil régional des Pays de la Loire), François Fillon est pour la première fois ministre (Enseignement supérieur et recherche) de 1993 en 1995 dans le gouvernement Balladur. Il l’est ensuite pendant quatre ans dans le gouvernement Juppé (Postes et Télécoms), et le redevient de 2002 à 2005 sous Raffarin (Travail, puis Éducation nationale). En 2007, Nicolas Sarkozy le nomme Premier ministre, un poste qu’il occupe pendant toute la durée du quinquennat. Si son rôle est en partie occulté par l’activisme incessant du président qui le marginalise et le qualifie de manière méprisante de « collaborateur », François Fillon se fait néanmoins remarquer par un style austère mais empreint d’une franchise parfois étonnante, notamment lorsqu’il déclare que la France est « en faillite sur le plan financier ».
Élu député de Paris en 2012 après la défaite de Sarkozy à la présidentielle, il tente quelques mois plus tard de prendre la tête de l’UMP face à Jean-François Copé (alors à la tête du parti). L’élection tourne toutefois à la confusion en raison de résultats serrés et controversés, et la formation de droite plonge dans une crise qui ne se dénoue vraiment que deux ans plus tard, avec d’abord la démission d’un Copé rattrapé par l’affaire Bygmalion et la constitution d’un triumvirat Juppé-Raffarin-Fillon, puis la tenue d’une nouvelle élection (où ne concourt pas Fillon) remportée par Nicolas Sarkozy.
Semaine du 23 au 29 janvier
Faits saillants de la campagne : le Penelopegate éclate. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : pour le candidat des Républicains, que les sondages pré-révélations du Canard donnaient qualifié pour le second tour mais à la baisse, c’est peu dire que le coup porté par le Penelopegate est rude : c’est tout simplement un des piliers de sa candidature (sa probité, son intégrité, son honnêteté, qu’il a amplement mises en avant lors de la primaire pour se différencier de Nicolas Sarkozy) qui menace de s’effondrer et d’emporter avec lui l’édifice qu’il a construit (prôner l’austérité et dénoncer l’assistanat et tous ceux qui profitent éhontément de l’argent public).
Sa défense est en outre rendue difficile par des propos passés de Penelope Fillon (elle a en diverses occasions confié ne s’être jamais impliquée dans la vie politique de son mari et être mère au foyer), et ses premières tentatives pour désamorcer l’affaire sont maladroites (il parle de « misogynie » de la part du Canard et de « boules puantes », mais ne dit rien sur le fond de la question) et ne convainquent pas grand monde. Quant aux sorties de sa garde rapprochée sur la compétence et l’implication de Mme Fillon, elles font pâle figure face aux éléments accréditant toute absence de prestations, quand elles ne sont pas tout simplement contradictoires (Penelope n’était pas à Paris et faisait un travail en circonscription d’après Benoist Apparu, porte-parole de Fillon, vs. Je l’ai souvent vue participer à ses travaux, je l’ai vue à l’Assemblée nationale, dixit Bernard Accoyer, ex-président UMP de ladite Assemblée).
Invité au JT de TF1 jeudi 26, François Fillon déclare qu’il se retirera de la présidentielle en cas de mise en examen (le parquet national financier a ouvert mercredi une enquête préliminaire pour détournement de fonds publics et abus de bien social), mais n’en continue pas moins de dénier fermement les accusations qui sont portées contre lui, et commence à sous-entendre qu’il y a un complot pour l’abattre. Quant aux déclarations de sa femme comme quoi elle ne s’est jamais impliquée dans la vie politique, il les justifie de manière sémantique : « Elle n’a jamais fait de politique au sens où elle n’a jamais été en première ligne ».
Incidemment, il évoque aussi le cas de deux de ses enfants, qu’il a employé dans un contexte semblable entre 2005 et 2007, lorsqu’il était sénateur de la Sarthe. Une manière d’anticiper de prochaines attaques du Canard sur ce sujet ? Si tel est le cas, la manœuvre échoue et se retourne contre lui : alors qu’il les a présentés sur TF1 comme avocats, ses enfants n’étaient à l’époque concernée que des étudiants en droit. « Imprécision de langage » se défend Fillon (il voulait dire, expliquera son entourage, qu’ils sont aujourd’hui avocats), qui en commet une autre dimanche à La Villette, pour ce qui aurait dû être le grand meeting lançant sa campagne : alors qu’il clame haut et fort n’avoir lui et sa femme qu’un seul compte en banque, il devra rétropédaler un plus tard en expliquant qu’il en a en fait plusieurs, mais, voulait-il dire, dans une seule banque …
Bref, le candidat des Républicains vit une très mauvaise passe et des voix de plus en plus nombreuses, y compris dans son propre camp, se demandent si le maintien de sa candidature est possible, voire simplement souhaitable. L’impact sur l’opinion publique semble fort et amoindri clairement ses chances de succès, et déjà circulent des rumeurs de possibles remplaçants. L’intéressé refuse pour l’instant d’évoquer une telle éventualité et affirme sa détermination à vaincre.
Semaine du 30 janvier au 5 février
Faits saillants de la campagne : le Penelopegate s’envenime et Macron, Mélenchon et Le Pen tiennent meetings à Lyon. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : le début de la semaine est marquée par l’accélération judiciaire du Penelopegate : François Fillon et son épouse sont entendus par des policiers de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières (OCLCIFF) le lundi 30, avant que ne le soit le mercredi 1er février Marc Joulaud, le suppléant de 2002 à 2007 à l’Assemblée nationale de Fillon. En outre, une perquisition a lieu à l’Assemblée nationale le mardi 31, dans le but de mettre la main sur les contrats de travail de Penelope Fillon, que celle-ci a été incapable de fournir (une autre perquisition avait déjà eu lieu la semaine précédente à la Revue des Deux mondes, dont le propriétaire Marc Ladreit de Lacharrière a depuis lui aussi été entendu par la police).
Bilan de ces événements : d’un côté un François Fillon qui se félicite d’avoir pu être entendu rapidement comme il le souhaitait ; de l’autre, divers éléments ne plaidant pas vraiment en sa faveur, comme le fait que son épouse n’ait jamais eu de badge ni d’adresse email de l’Assemblée, même si, expliquent ses soutiens, cela se justifie parce qu’elle exerçait son travail depuis la Sarthe … D’autres révélations viennent en outre alourdir la barque : ainsi le Canard enchaîné révèle cette semaine que les sommes totales reçues par Penelope Fillon s’élèvent en fait à 900 000 euros (et non plus 600 000) et que, contrairement à ce que son mari a affirmé précédemment, il ne l’a pas embauchée à partir de 1997, mais l’avait déjà fait entre 1988 et 1990. Le palmipède dévoile également les montants reçus (environ 84 000 euros) par les enfants du couple pour des travaux effectués pour le compte du sénateur François Fillon alors qu’ils n’étaient encore qu’étudiants, puis affirme que Penelope Fillon, lorsqu’elle assistait Marc Joulaud, touchait 10 000 euros/mois, c.-à-d. plus que le député lui-même et plus que le maximum autorisé. Enfin, il conclut en annonçant que le candidat Les Républicains a opportunément cessé de faire travailler sa famille fin 2013, un mois avant l’entrée en vigueur de la loi sur la transparence qui l’obligeait à dévoiler le nom de ses attachés parlementaires …
De son côté, Mediapart y va aussi de sa contribution en affirmant que le propriétaire de La Revue des Deux mondes Marc Ladreit de la Charrière aurait entre 2015 et 2016 employé fictivement une membre de l’équipe de campagne de François Fillon via sa Fondation culture et diversité. C’est ensuite au tour des activités de la société de consultance de François Fillon 2F Conseil (fondée en 2012, douze jours avec que l’intéressé ne redevienne député et donc ne tombe sous le coup de la loi interdisant les parlementaire de créer de telles sociétés) d’être dans la cible de questions, plusieurs médias s’interrogeant sur ses contrats et clients, et soupçonnant des risques de conflits d’intérêt.
Mais le coup potentiellement le plus dévastateur était encore à venir. Il tombe le jeudi 2 février au cours de l’émission Envoyé spécial sur France 2, où est diffusé un extrait d’interview accordée en 2007 au Daily Telegraph dans lequel Penelope Fillon déclare : « Je n’ai jamais été son assistante ou quoi que ce soit de ce genre ».
Face à ce déferlement, François Fillon se déclare « serein », fait « confiance à la justice », dénonce « une opération de calomnie d’une ampleur professionnelle jamais vue » et parle « d’un coup d’État institutionnel venu de la gauche », ce dernier élément de langage soulignant au passage la volonté de nier que le candidat des Républicains soit la victime d’un traître au sein de sa propre famille politique (Rachida Dati par exemple, dont le nom est l’objet de force rumeurs, ou alors des sarkozystes). Dans la ligne de mire : le gouvernement actuel, ou alors plus précisément Bercy, où œuvrait jusqu’en août dernier Emmanuel Macron
En pratique cependant, la panique règne à droite, et des voix dissonantes se font de plus en plus entendre. Si officiellement Alain Juppé affirme ne pas vouloir être un plan B, le sénateur Alain Houpert (soutien de … Juppé) déclare qu’il faut « avoir la dignité de changer de candidat », rejoignant en cela le député Georges Fenech (réputé pro-Sarkozy) pour qui le résultat de la primaire est aujourd’hui « caduc ». La pression se fait donc de plus en plus forte sur François Fillon, lequel ne veut rien entendre, répète qu’il sera candidat, et demande aux parlementaires Les Républicains de tenir ferme derrière pendant quinze jours pour pouvoir prouver son innocence.
Semaine du 6 au 12 février
Faits saillants de la campagne : Marine Le Pen dope l’audience de France 2 et Fillon essaye de contre-attaquer. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : lundi 6 février : François Fillon tient à 16 heures une conférence de presse dont la tenue a été annoncée le matin même. Au menu, un message aux Français (mais surtout à sa base électorale de droite), qui peut se résumer par : « il y a eu péché, il était véniel et a été monté dans des proportions insensées, c’est un complot, je suis une victime, l’important, c’est la rupture que je porte vis-à-vis de la gauche, et je suis légitime pour la porter parce que deux millions de Français l’ont choisi à la primaire de la droite ».
Péché ? Oui, François Fillon l’admet, il en a commis un : avoir continué à employer son épouse comme collaboratrice alors que cette pratique qui était « acceptable hier » (…) « ne l’est plus aujourd’hui ». Bref, une erreur d’appréciation qu’il regrette et pour laquelle il présente ses excuses, même si, ne manque-t-il pas de souligner, tout était légal. Et … c’est tout. Le caractère fictif de l’emploi de Penelope Fillon ? Il le dément. Les sommes perçues par ses enfants ? Rien n’était dissimulé et tout était parfaitement en règle. Le manque de transparence qui lui est reproché ? Il le rejette et déclare qu’il n’a rien à cacher, passant ensuite en revue son patrimoine, ses comptes en banque et quelque-uns des clients de sa société de consultance (les noms cités sont ceux d’AXA – dont il est proche du PDG Henri de Castries – et de Fimalac – propriétaire de la Revue des Deux mondes).
Bref, Fillon campe sur ses positions, parle d’une opération « destinée à détourner l’attention de nos concitoyens des véritables enjeux », affirme que son programme « dérange l’ordre établi » et refuse que l’on vole le choix des « millions de Français qui m’ont choisi au terme d’une campagne loyale ». Un retrait ? Hors de question. « Rien ne me détournera de mon devoir d’être candidat à la présidentielle ».
Le texte intégrale de son intervention
Si l’intervention de Fillon a été meilleure dans la forme que ses sorties précédentes, elle ne suffit toutefois pas à éteindre l’incendie. Plusieurs des éléments qu’il a avancés pour sa défense sont pour le moins spécieux (voir l’analyse qu’en fait Le Monde), et il n’a fourni aucun élément concret permettant de lever la suspicion quant à la réalité du travail effectué par son épouse en tant qu’assistante parlementaire. De plus, rien n’a été dit concernant le cas de son emploi à La Revue des Deux mondes. Sa sortie lui permet toutefois de donner l’impression à son camp de contre-attaquer et de clamer son bon droit, avec, dans le viseur, d’éventuels comploteurs, mais aussi la presse, qu’il accuse de mener une « chasse à l’homme » et de « lynchage médiatique ».
Autre tactique déployée : mettre en doute la légitimité de l’enquête ouverte contre lui par le Parquet national financier (PNF), dont il remet en cause la compétence à enquêter sur des de détournements de fonds reprochés à un parlementaire (d’après ses avocats, seules les personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public peuvent être poursuivis pour ce motif, pas les tenants d’un mandat électif). Autre argument juridique avancé : dénier le droit au parquet du juger de la réalité du travail d’un collaborateur parlementaire, au nom (toujours selon les avocats de François Fillon) du principe de la séparation des pouvoirs judiciaire et législatif. Une telle tentative pour obtenir le dessaisissement de l’affaire (une requête demandée le jeudi 9) semble toutefois avoir peu de chances d’aboutir.
Autres développements de l’affaire
- Le Canard enchaîné continue de distiller au compte-gouttes ses révélations. Ainsi annonce-t-il cette semaine que Penelope Fillon aurait touché près de 45 000 euros d’indemnités de licenciement lorsque ses contrats de travail ont pris fin en 2002 et 2013. Si le fait de percevoir de telles indemnités est légal, c’est l’ampleur des montants perçus qui posent ici question, ceux-ci paraissant élevés, dit le Canard, par rapport à ce qui se pratique en général pour ce genre de fonction.
- Concernant Marie Fillon (la fille de), le Canard révèle qu’elle menait un stage d’avocate en même temps qu’elle accomplissait son emploi (controversé) d’assistante parlementaire à temps plein de son père. « Une incroyable bête de travail » ironise le volatile.
- Canard encore et toujours, cette fois pour dévoiler comme François Fillon a imposé aux caciques LR de ne pas chercher à l’éjecter : tout simplement en brandissant la menace d’une action en justice, les statuts du parti conférant au vainqueur de la primaire une position juridique blindée qui lui permettrait de contester avec grande chance de succès toute tentative pour le remplacer sans son consentement par un hypothétique plan B.
- Cette semaine à nouveau mouvementée se termine par un déplacement de trois jours à La Réunion, où des heurts (légers) ont lieu entre des partisans LR et des militants de La France insoumise venus brocarder le candidat.
Semaine du 13 au 19 février
Faits saillants de la campagne : Macron déclenche un tollé en associant colonisation et crime contre l’humanité. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : la tempête continue pour François Fillon, qui passe plus de temps à essayer de se sortir du pétrin causé par le Penelopegate qu’à mener campagne. Le PNF (Parquet national financier) a ainsi annoncé le jeudi 16 février qu’il écartait l’hypothèse d’un classement sans suite de la procédure et que celle-ci va se poursuivre. Fillon a beau dénoncer une opération médiatique du Parquet et ses avocats encore et toujours contester la compétence de celui-ci à mener l’enquête, cette annonce est pour nombre d’observateurs le signe que des éléments suffisamment probants ont été mis à jour que pour ne pas la classer sans suite et que des mises en examen sont possibles.
Au sein des Républicains aussi la situation demeure tendue. En début de semaine, une quinzaine de parlementaires ont fait circuler un courrier dans lequel ils constatent l’impossibilité de mener campagne sur le terrain au vu du manque de clarifications de la part de François Fillon et de la démobilisation qui s’empare des militants. Parmi les plus actifs à porter ce message : Georges Fenech, qui s’était déjà fait entendre les semaines précédentes et est réputé proche de Sarkozy. Une manière pour ce dernier de mettre la pression sur son ex-Premier ministre et le contraindre à se rapprocher de lui ? Toujours est-il que les deux hommes ont déjeuné ensemble mercredi, un déjeuner demandé par un Fillon qui a besoin de s’assurer le soutien total de sa famille politique, et au cours duquel Sarkozy lui aurait conseillé d’impliquer davantage dans la campagne des membres de son entourage, notamment le maire de Troyes François Baroin, dont le nom (avec celui d’Alain Juppé) circule depuis l’éclatement de l’affaire comme possible plan B si Fillon venait à se retirer (même si l’intéressé continue d’exclure formellement un tel scénario).
Rayon affaires toujours, le Canard enchaîné a tenté cette semaine d’allumer une nouvelle mèche en accusant le porte-parole de François Fillon, Thierry Solère, d’être sous le coup d’une enquête pour fraude fiscale. Contrairement aux divulgations précédentes toutefois, cette nouvelle ne suscite qu’un bref émoi et disparaît vite des radars. Provisoirement seulement ?
Rayon campagne, François Fillon dévoile une nouvelle proposition pour son programme : abaisser la majorité pénale à 16 ans afin de pouvoir plus facilement poursuivre les jeunes délinquants. Une proposition très … sarkozienne, qui laisse à penser que le thème de la sécurité va être abondamment exploité durant la suite de la campagne.
Sondages au 22 février
Le Penelopegate se répercute violemment sur François Fillon : il perd six points par rapport au sondage de janvier du Cevipof. Grand bénéficiaire : Emmanuel Macron, qui passe devant le candidat LR pour la deuxième place.
Semaine du 20 au 26 février
Faits saillants de la campagne : François Bayrou rejoint Emmanuel Macron, Yannick Jadot fait de même avec Benoît Hamon, François Fillon pare de quasi-guerre civile et une assistante de Marine Le Pen est mise en examen dans le cadre de l’affaire des assistants parlementaires européens. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : François Fillon espérait enfin passer une semaine à mener campagne et mettre en avant ses propositions, notamment concernant les soins de santé, à propos desquels il a donné mardi 21 une vision rectifiée de son programme initial. Hélas pour lui, ses espoirs ont été déçus, le Penelopegate le rattrapant vendredi 24 lorsque le PNF (Parquet national financier) a ouvert une information judiciaire pour détournements de fonds publics, abus de biens sociaux et recel, trafic d’influence et manquement aux obligations de déclaration à la Haute Autorité sur la transparence de la vie publique.
L’accélération de l’action judiciaire s’explique notamment par la volonté du parquet d’éviter tout risque de prescription d’une partie des faits (ceux antérieurs à 2005). L’adoption le 16 février dernier d’une loi sur la prescription pénale pose en effet question sur la rétroactivité qu’elle peut avoir sur des enquête préliminaires en cours, c.-à-d. le type d’enquête jusqu’ici ouverte dans le cadre du Penelopegate. Dès lors, pour éviter toute confusion, le Parquet a décidé de passer à la vitesse supérieure en ouvrant une instruction quelques jours avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, cette décision permettant de lever toute ambiguïté juridique relative à la prescription. Autre conséquence : l’affaire est désormais dans les mains de trois juges d’instructions, lesquels ont la possibilité de convoquer en vue d’une éventuelle mise en examen François Fillon, son épouse et ses enfants.
De son côté, le candidat LR a tenu dimanche des propos forts en accusant le Premier ministre Bernard Cazeneuve et son gouvernement de laisser « se développer dans le pays un climat de quasi-guerre civile », en voulant pour preuve les débordements que des trublions provoquent à ses meetings (notamment des … concerts de casseroles), mais aussi les incidents lors d’un rassemblement de Macron à Toulon peu après ses propos sur la colonisation, ainsi que les heurts violents qui ont eu lieu à Nantes en marge d’une manifestation pro-FN prise à partie par des militants de gauche. Ces propos (en particulier l’emploi de « quasi-guerre civile ») ont été vivement critiqués, Fillon se voyant reprocher d’aviver la colère de ses partisans contre les boucs-émissaires qu’il désigne, les médias les semaines passées, et maintenant le gouvernement.
Semaine du 27 février au 5 mars
Faits saillants de la campagne : convoqué par la justice, Fillon joue son va-tout au Trocadéro. Elle aussi convoquée par un juge, Marine Le Pen refuse de donner suite. Macron dévoile enfin son programme. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : nouvelle semaine éprouvante pour François Fillon, la plus folle depuis le déclenchement du Penelopegate. Son emballement commence mercredi matin, lorsque, à la surprise de tous, y compris de ses collaborateurs qui l’y attendent, le candidat LR annule à la dernière minute sa visite prévue au Salon de l’agriculture. L’explication tombe à midi au cours d’une déclaration à la presse effectuée par l’intéressé : les juges d’instruction en charge du Penelopegate viennent de le convoquer pour le 15 mars en vue d’une mise en examen !
Si les semaines précédentes avaient eu leur lot de coups de tonnerre, celui-ci est d’une ampleur inédite. Car si la mise en examen du candidat n’est pas certaine (l’entretien avec les juges peut déboucher sur un statut de témoin assisté), cette convocation n’en est pas moins un signe fort de la matérialité des soupçons portant sur Fillon.
En pratique, si les juges (à qui le PNF a transmis le dossier la semaine passée) ont été rapides à décider de cette convocation, c’est probablement en raison de l’approche du 17 mars, c.-à-d. la date-butoir de clôture des candidatures à la présidentielle. Convoquer Fillon après cette date aurait été possible mais délicat (encore plus que cela ne ne l’est maintenant) vu la proximité de l’échéance électorale. En agissant comme ils l’ont fait, les magistrats évitent le risque de ne pas pouvoir l’entendre avant plusieurs semaines (en particulier s’il est élu, puisqu’il serait alors protégé de toute poursuite pendant au moins cinq ans), pour autant évidemment que l’intéressé se rende à la convocation et ne fasse pas comme Marine Le Pen.
Voilà pour le volet juridique. Quid sur le plan politique ? S’il avait d’abord dit qu’il retirerait sa candidature en cas de mise en examen, le candidat LR a depuis changé d’avis : « Je ne céderai pas, ne me rendrai pas, je ne me retirerai pas, j’irai jusqu’au bout, parce que, au-delà de ma personne, c’est la démocratie qui est défiée », déclare-t-il, allant jusqu’à parler d’un « assassinat politique ». Il ajoute aussi : « Par ce déchaînement disproportionné, par ce choix de calendrier, ce n’est pas seulement moi qu’on assassine, c’est l’élection présidentielle ». Bref, il se pose en victime et s’en remet au suffrage universel comme seul juge de ses actes.
Sa famille politique toutefois ne l’entend pas de la même oreille. En quelques heures, c’est une véritable hémorragie de soutiens qui s’opère, avec, en première ligne, Bruno Le Maire qui démissionne du poste qu’il tenait dans son équipe, puis l’UDI qui, via son président Jean-Christophe Lagarde, annonce qu’elle suspend sa participation à la campagne. Et ce n’est qu’un début. Les défections sont si nombreuses que le compteur des lâcheurs de François Fillon mis en place par Libération dépasse les 200 élus au bout de deux jours. Parmi les plus notables : Yves Jégo, Christine Boutin, Pierre Lellouche, Georges Fenech, Benoist Apparu, Nadine Morano, Renaud Muselier, le propre parole de Fillon Thierry Solère, Dominique Bussereau, Virginie Calmels, Chantal Jouanno, etc., etc. Des sarkozystes, des juppéistes, des lemairistes, des UDistes, des membres l’équipe proche : la saignée est générale.
Malgré ces départs, Fillon demeure inébranlable et tente même un coup de force : rassembler un maximum de sympathisants dimanche au Trocadéro afin de montrer qu’il jouit toujours du soutien de la rue. Face à ce véritable va-tout que joue le candidat LR, les réactions de son camp sont d’autant plus partagées que l’hebdomadaire de droite dure Valeurs actuelles relaye l’événement comme étant une « marche contre le coup d’Etat des juges ». Comprenant le danger, l’entourage de Fillon (notamment le sénateur Bruno Retailleau) calme un peu le jeu (ou en tout cas essaye de le faire) en déclarant que le rassemblement vise avant tout à défendre les valeurs et le projet de redressement portés par le candidat.
Les jours précédant le meeting sont électriques. Jeudi, le domicile parisien des Fillon est perquisitionné. Vendredi, c’est au tour de leur château dans la Sarthe d’être le théâtre d’une descente de police, tandis que, dimanche matin, paraît dans le JDD une interview de Penelope Fillon qui affirme son soutien sans faille à son mari et défend la réalité de ses emplois d’assistante parlementaire et à la Revue des Deux mondes. La veille, samedi, Fillon a tenu un meeting à Aubervilliers dans une salle que Le Monde rapporte comme en grande partie restée vide. Pendant ce temps, les défections continuent, dont deux remarquées : celle du directeur de campagne Patrick Stefanini, qui remet sa démission vendredi soir avec prise d’effet après le Trocadéro ; puis, dimanche matin, celle du maire de Nice Christian Estrosi, qui évoque sa « gêne » devant le rôle majeur que joue dans l’organisation du Trocadéro les mouvements catholiques durs La Manif pour tous et Sens commun. De leur côté, en coulisses, les ténors LR discutent et tentent de trouver une « sortie respectueuse » à offrir au vainqueur de la primaire, lequel ne veut rien entendre, et surtout pas si c’est de Juppé dont il s’agit pour le remplacer.
Dimanche, à 15h, l’affluence au Trocadéro est notable. 200 000 personnes comme le clameront Fillon et ses soutiens ? Certainement pas. Informé par une source policière, BFM parle plutôt de 40 000. Quoi qu’il en soit, la foule présente est suffisante pour permettre à François Fillon d’y voir une mobilisation populaire en faveur de son maintien. Sur scène, plusieurs dizaines d’élus se sont groupés derrière celui qui est toujours candidat. Parmi eux : François Baroin, que Nicolas Sarkozy a dans les semaines passées positionné comme possible plan B. Comment interpréter cette présence ? Le signe d’une allégeance négociée du camp sarkozyste vis-à-vis d’un Fillon inflexible ? La préparation d’un désistement de ce dernier en faveur du maire de Troyes ? L’indécision règne et le discours tenus par Fillon n’aident pas forcément à y voir plus clair : aux proclamations répétées de son innocence et de sa détermination succèdent des propos de doutes et d’autres où il semble dresser la feuille de route programmatique que devra(it) suivre un éventuel successeur. Sa conclusion se veut toutefois ferme : il a fait son examen de conscience, aux femmes et aux hommes du parti de maintenant faire le leur et de se demander : « Laisserez-vous les passions du moment l’emporter ? »
Dans la soirée, Fillon est invité au JT de France 2. Le propos y est sans ambiguïtés : « Personne aujourd’hui ne peut m’empêcher d’être candidat ». La démonstration du Trocadéro, estime-t-il, le conforte dans sa position : le peuple de droite le veut et a réaffirmé son soutien à son programme. Il répète ensuite être innocent et n’avoir rien à se reprocher sur le plan légal, puis en remet une couche sur un « hold-up démocratique » et des « pratiques honteuses », parmi lesquelles celle des chaînes de télé qui ont annoncé mercredi le suicide de sa femme, une fausse info qui … n’a en réalité jamais été annoncée par aucun média. Dérapage incontrôlé de celui qui, jusqu’à nouvel ordre, demeure le candidat LR ? Au vu de ce qui était en jeu ce week-end, cette question est anecdotique et sans importance. Fillon a tenté un coup de poker, il a fonctionné, pas forcément de manière éclatante, mais suffisamment que pour se sentir conforté et gagner au moins un sursis, voire plus.
Sondages au 9 mars
Les tendances du mois passé se confirment, avec Emmanuel Macron qui continue de progresser et tourne désormais autour des 25%, tandis que François Fillon baisse encore à 17,5% (à noter : le sondage a été réalisé juste avant le meeting du Trocadéro). De son côté, Marine Le Pen n’est pas touchée par les affaires qui la frappent et reste stable, tandis que Hamon et Mélenchon ne créent pas de dynamique en leur faveur
Semaine du 6 au 12 mars
Faits saillants de la campagne : Fillon gagne son quitte ou double et Hamon réduit le cadre de son revenu universel. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : François Fillon a gagné son quitte ou double. Quelle qu’ait été l’affluence réelle au Trocadéro, la mobilisation des partisans du candidat LR est apparue suffisante pour le maintenir en selle et lui permet au soir du dimanche 5 mars de réaffirmer sa volonté inébranlable de demeurer candidat.
Pendant ce temps, en coulisses, les tractations entre Nicolas Sarkozy et Alain Juppé pour pour mettre sur pied un plan B patinent, l’ex-Président demandant en échange de son soutien que l’ancien Premier ministre droitise le programme avec lequel il ferait campagne et prenne dans son équipe plusieurs de ses poulains. Au vu de la situation (entêtement de Fillon, succès du Trocadéro, marchandage de Sarkozy), le maire de Bordeaux annonce une conférence de presse pour lundi matin et y déclare : « Il est trop tard (…) une bonne fois pour toute, je ne serai pas candidat ». Pour justifier sa décision, il explique ne pas être en mesure d’effectuer le rassemblement nécessaire et préfère dès lors renoncer à être un recours. Il souligne également avoir pris note de la volonté de renouvellement exprimée par les Français, ainsi que leur exigence d’exemplarité, une exigence qu’il ne peut incarner pleinement du fait de sa condamnation passée dans l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris. Concernant François Fillon, il regrette son obstination ainsi que son système de défense mettant en avant un « prétendu complot ».
Juppé définitivement out, le bureau politique LR prévu pour lundi soir devient une formalité pour Fillon, qui a alors beau jeu d’appeler au rassemblement. Parmi ses premières tâches : reconstituer une équipe décimée par les défections. Tout profit pour les sarkozystes qui lui sont restés fidèles, au rang desquels le maire de Troyes François Baroin, désormais en charge du « rassemblement politique » et que les rumeurs présentent comme « en ticket » avec Fillon, c.-à-d. promis pour le poste de Premier ministre si Fillon gagne l’élection … ce qui est très incertain. Car si Fillon a réussi à survivre à la tempête parfaite qu’il vient d’affronter, les dégâts subis n’en sont pas moins considérables (ses sondages ont dégringolé à 17-19%) et l’affaire à la base de ses déboires est loin d’être terminée. Ainsi non seulement va-t-il devoir gérer la probable officialisation d’une mise en examen la semaine prochaine, mais en outre doit-il s’attendre à ce que des répliques viennent régulièrement agiter sa campagne, comme en témoignent celles survenues ces derniers jours :
- d’abord la révélation du Canard enchaîné d’un prêt de 50 000 euros consenti par Marc Ladreit de Lacharrière (le propriétaire de la Revue des Deux mondes) que Fillon a omis de faire figurer dans sa déclaration de patrimoine
- ensuite l’affirmation du JDD selon laquelle le candidat LR se serait vu offrir pour 48 500 euros de costumes en cinq ans de la part d’un ou plusieurs amis anonymes, ce qui n’a pas manqué de soulever de nouvelles questions concernant de possibles conflits d’intérêt.
Comme si cela ne suffisait pas, cerise sur le gâteau, la fin de semaine de Fillon est marquée par un dérapage sur le compte Twitter des Républicains, lequel diffuse un tweet représentant Macron affublé de traits caractéristiques des caricatures antisémites en vogue dans les années 1930. Évidemment : tollé immédiat. Dès lors le tweet est retiré dare-dare et François Fillon annonce des sanctions internes contre ceux à l’origine de ce dérapage.
Enfin, une dernière remarque pour signaler la volte-face de l’UDI qui, après avoir lâché le candidat LR juste avant le Trocadéro, a depuis fait machine arrière et a renoncé à aller vers Macron au profit d’un accord électoral lui offrant un minimum de 96 circonscriptions pour les législatives.
Semaine du 13 au 19 mars
Faits saillants de la campagne : Mélenchon prend République, Dupont-Aignan fait un esclandre sur TF1 et François Fillon est officiellement mis en examen. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : la semaine de François Fillon a été marquée par deux premières journées aux parfums très différents. Le lundi 13 a en effet été l’occasion pour lui de présenter la mise à jour de son programme, lequel devait être ajusté pour incorporer les nouvelles propositions portées par le candidat depuis la fin des primaires. A l’arrivée, les modifications sont peu nombreuses et relativement secondaires, le coeur du programme défendu par François Fillon restant le même.
Très différente a été la journée de mardi du candidat républicain. C’est en effet ce jour-là qu’il a été entendu par les magistrats chargés d’enquêter sur le Penelopegate. Au départ prévue pour le mercredi 15, cette comparution a été secrètement avancée de vingt-quatre-heures à la demande des avocats de François Fillon pour éviter le tumulte médiatique qui n’aurait pas manqué de se produire. Au cours de l’entretien, les juges ont notifié à l’intéressé sa mise en examen au titre de détournement de fonds public, complicité et recel de détournements de fonds publics, complicité et recel d’abus de biens sociaux et manquement aux obligations déclaratives. De son côté, François Fillon s’est borné à lire aux magistrats une déclaration préparée à l’avance.
Du point de vue la campagne, cette nouvelle n’a pas vraiment provoqué de nouveaux remous, son onde de choc s’étant déjà propagée deux semaines auparavant, lorsque Fillon avait lui-même annoncé la convocation dont il faisait l’objet et, dans la foulée, joué son va-tout au Trocadéro, de sorte que la mise en examen qui lui a été signifiée ce mardi est venue davantage comme une confirmation que comme un rebondissement bouleversant la donne. La pression n’en va pas moins rester de mise pour le candidat républicain, qui continue de voir diverses révélations s’abattre sur lui. Ainsi :
- concernant le « prêt » de € 50 000 consenti (sans intérêt) par Marc Ladreit de Lacharrière (le propriétaire de la Revue des Deux mondes) que Fillon a omis de faire figurer dans sa déclaration de patrimoine, le Canard enchaîné rapporte que celui-ci a été remboursé en catastrophe fin février avant que l’affaire ne soit rendue publique, ceci afin de limiter les dégâts électoraux et permettre au candidat républicain de dénoncer une opération de déstabilisation lorsqu’elle a été dévoilée.
- concernant les costumes d’une valeur de € 48 500 euros offerts à François Fillon, l’identité d’au moins un des généreux amis auteurs de ces cadeaux est désormais connue : l’avocat Robert Bourgi, notamment connu pour son implication dans les réseaux liés à la Françafrique. Si ce dernier a reconnu avoir offert pour 13 000 euros de vêtements à François Fillon en février dernier, le doute demeure concernant les autres 35 500 euros, qui pourraient être le fait de Bourgi ou pas. De son côté, le Parquet national financier (PNF) a élargi l’enquête concernant le Penelopegate à cette nouvelle affaire afin de découvrir si un trafic d’influence n’y est pas lié.
- concernant les salaires perçus comme assistants sénatoriaux par les enfants Charles et Marie Fillon, le journal Le Parisien annonce que ceux-ci ont été en partie reversés aux parents Fillon : à hauteur de 70% pour Marie Fillon et de 30% pour son frère. Les explications avancées par leurs avocats (rembourser le prix de son mariage pour la première, rembourser de l’argent de poche et le loyer d’un studio pour le second) ne manquent pas de faire sourire, d’autant que plusieurs éléments contradictoires y sont vite repérés.
Lundi 20 mars – Le grand débat sur TF1
Le compte-rendu détaillé du débat : voir ici
Faits saillants concernant le candidat : François Fillon a connu une soirée en deux temps, un premier où il fut pratiquement inexistant et se contenta de répondre aux questions sans se faire remarquer, et un second où il se montra plus volontaire et plus mordant. Cette attitude, révéla Le Parisien deux jours plus tard, s’explique en partie par le fait que le candidat Les Républicains a passé la première moitié de l’émission les yeux rivés sur son portable à échanger avec sa conseillère en communication Anne Méaux sur l’attitude à adopter. Autre raison avancée : se faire le plus discret possible tant que les affaires et questions éthiques n’avaient pas été abordées, histoire de ne pas être trop vivement pris pour cible. Et de fait, le comportement de Fillon changea dès lors que les sujets furent derrière lui et devinrent plus techniques (nucléaires, économie) et qu’il put faire valoir son expertise, sa responsabilité et son sens du réalisme, qu’il opposa aux promesses présentées comme intenables de ses rivaux.
Ses piques et prises à partie se firent alors plus nombreuses. A l’égard d’Emmanuel Macron, elles furent le plus souvent sarcastiques ou par insinuation. A l’égard de Le Pen en revanche, elles furent plus virulentes, notamment lorsqu’il qualifia de serial killer sa volonté de sortir de l’euro ou lui rétorqua avec une colère froide « Caricature, madame, caricature ! » lorsqu’elle évoqua son projet de privatiser la Sécurité sociale.
En résumé, François Fillon a mis en avant ses compétences de gestionnaires des comptes publics (même si Le Pen ne se priva de critiquer férocement son bilan de Premier ministre) et une certaine stature d’homme d’Etat, mais n’a pas bousculé son rival principal qu’est devenu Emmanuel Macron.
Jeudi 23 mars – François Fillon à « L’Émission politique » de France 2
François Fillon a-t-il perdu toute mesure ? Alors que de énièmes révélations viennent une nouvelle fois de mettre sa campagne aux abois, le candidat républicain profite de son passage dans « L’Émission politique » pour déclencher l’arme nucléaire. Se basant sur les bonnes feuilles d’un livre à paraître dont il a eu connaissance (« Place Beauvau, Police : Les secrets inavouables d’un quinquennat » par … des auteurs du Canard enchaîné), François Filon accuse nommément le président de la République François Hollande d’être l’auteur d’une machination à son encontre et d’avoir mis en place un cabinet noir pour faire remonter à lui en complète illégalité toute une série d’écoutes et orchestrer les fuites qui abreuvent depuis plusieurs semaines les médias. « Un scandale d’Etat » affirme-t-il, non sans prendre une (discrète) précaution oratoire (« si ces allégations sont vraies »).
Alors que l’émission n’est pas terminée, le Président publie un communiqué dans lequel il condamne « avec la plus grande fermeté les allégations mensongères » proférées ce soir, tandis que Jean-Jacques Urvoas, l’actuel garde des sceaux, déclare que François Fillon « a voté systématiquement contre tous les textes renforçant l’indépendance de la justice et favorisant l’indépendance ». De son côté, l’un des auteurs du livre (Didier Hassoux) dément avoir « jamais écrit ça ». Quant au compte Twitter de l’émission, il est pris d’assaut et enregistre 170 000 messages alors que le maximum atteint pour un autre invité avait culminé à 100 000. Bref, si l’un des objectifs de cette sortie était de faire du bruit, il est pleinement atteint. Quant à savoir si cela sera au profit de l’intéressé …
L’émission est également marquée par un affrontement virulent entre le candidat LR et l’écrivaine Christine Angot. Son compte-rendu et celui de toute l’émission : ici.
Semaine du 20 au 26 mars
Faits saillants de la campagne : le grand débat a lieu ; Fillon dénonce un « cabinet noir » ourdi par Hollande ; Le Drian rallie Macron et des négociations PS-En Marche pour les législatives sont supposés. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : la campagne de François Fillon continue d’aller à vau-l’eau et le candidat républicain de se perdre dans des tentatives désespérées pour renverser une situation qui paraît impossible à sauver.
Après un débat en demi-teinte lundi, le candidat républicain a vu sa semaine être à nouveau entachée par des révélations compromettantes pour sa réputation. Mardi, Le Monde dévoile en effet que le PNF a ajouté aux faits reprochés à Fillon l’accusation d’escroquerie aggravée, faux et usage de faux. En cause : des documents saisis lors d’une perquisition à l’Assemblée nationale en mars, portant sur des calculs d’heures travaillées par Penelope Fillon et dont les enquêteurs se demandent s’ils ne seraient pas des faux établis a posteriori.
Le Canard enchaîné renchérit dans son édition du mercredi 22 en y ajoutant le soupçon d’une fausse déclaration « certifiant aux fonctionnaires de l’Assemblée nationale que madame ne bossait pas plus d’une trentaine d’heures par mois à la Revue des Deux mondes où elle était payée pour … 151,67 heures ». La raison de cette déclaration ? Pouvoir contourner un règlement de l’Assemblée limitant à 180 heures par mois le cumul d’emplois pour ses salariés. Comme Penelope Fillon y était renseignée comme travaillant 150 heures / mois comme assistante parlementaire, elle n’aurait donc pas pu cumuler les deux salaires, d’où le besoin de réduire le temps passé à celui de La Revue à une trentaine d’heures mensuelles.
Canard toujours, dans la même édition du 22 mars : Fillon y est accusé d’avoir « jouer les entremetteurs » pour un milliardaire libanais qui souhaitait rencontrer Vladimir Poutine et le PDG de Total Patrick Pouyanné pour parler projets avec eux (ces rencontres auront bien lieu en juin 2015 à Saint-Pétersbourg). Montant perçu par Fillon via sa société 2F Conseil pour ce service (et la promesse de mises en contact avec d’autres dirigeants mondiaux) : 50 000 euros, plus un bonus de 1,5% à 2,5% sur les bénéfices des affaires qui en seront retirées. Si un tel contrat semble a priori légal, c’est à nouveau la question de risque de conflits d’intérêt et de trafic d’influence qui transparaît. De son côté, le Kremlin a cru nécessaire de réagir en soulignant qu’il n’avait pas besoin d’intermédiaire pour rencontrer des investisseurs.
La série noire se poursuit plus tard dans la semaine avec :
- la révélation dans sa déclaration de patrimoine d’un emprunt de 30 000 euros consenti par … sa fille Marie, pour pouvoir payer des dettes fiscales. En tant que telle, cette situation n’a rien de spéciale, mais, associé au souvenir de l’emploi soupçonné fictif de Marie Fillon et des 70% des revenus touchés qu’elle a remboursés à son père, elle fait sourire
- l’annonce par l’ONG Transparency International France que François Fillon est, malgré les relances de l’organisation, le seul candidat à ne pas avoir pris d’engagements en matière d’éthique de la vie publique (il le fera finalement après cette annonce)
- dans le cadre des emplois supposés fictifs de Penelope Fillon, l’officialisation de la mise en examen de Marc Joulaud, le suppléant de François Fillon à l’Assemblée nationale lorsque celui-ci est devenu ministre en 2002
- le cadeau d’une montre de 10 000 euros en 2009 (quand il était Premier ministre) par un homme d’affaires italo-suisse
- la fuite dans le JDD du 26 mars d’extraits de l’audition à la police de Penelope Fillon le 30 janvier. Ici, pas de révélation bouleversante, mais la confirmation d’un système de défense qui apparaît décidément bien bancal.
Confronté à ce cirque infernal, Fillon ne parvient pas à faire entendre sa voix, ou alors, pour cela, doit-il se placer sur le signe de l’outrance maximale, comme jeudi soir dans « L’Émission politique » de France 2, lorsqu’il accuse « solennellement » François Hollande d’avoir monté un « cabinet noir » et de mener une machination pour l’abattre. Quelles preuves a-t-il de ce complot ? « Un livre », dit-il, un livre écrit notamment par deux journalistes du Canard et dont il a pris connaissance des bonnes feuilles, des bonnes feuilles qui, affirment-ils, dénoncent tout ce qu’il vient de dire. Contactés à ce sujet, lesdits auteurs démentent une telle interprétation. Pendant ce temps, sur la plateau, François Fillon se prend en pleine face une attaque furieuse de l’écrivaine de Christine Angot. Bilan de la séquence ? Peut-être l’irréductible socle électoral du candidat LR en sortira-t-il renforcé dans sa conviction d’un scandale d’Etat pour faire tomber son poulain. Les autres en revanche …
Sondages au 31 mars
Les tendances du sondage quotidien publié par Ifop-Fiducial confirment le duel qui s’annonce au second tour entre Le Pen et Macron. De son côté, Fillon est donné comme continuant à se tasser, au point de sentir le souffle de Jean-Luc Mélenchon, lequel profite du débat et de sa marche sur République pour distancer un Benoît Hamon qui perd du terrain, au point de risquer de passer sous les 10%.
Les jeux sont-ils faits ? François Fillon continue d’espérer un sursaut des électeurs de la droite républicaine, que ses affaires ont pu refroidir. Il faut dire que l’abstention est donnée depuis plusieurs semaines à un niveau élevé (30, voire 35%) et constitue un motif d’espoir pour certains d’y puiser en dernière minute des réserves qui leur manque.
Concernant le second tour, Emmanuel Macron y est toujours donné largement favori (60 vs 40) dans le cas d’un affrontement avec Marine Le Pen.
Semaine du 27 mars au 2 avril
Faits saillants de la campagne : Valls annonce qu’il votera Macron, et Penelope Fillon est officiellement mise en examen. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : pour la première fois depuis longtemps, François Fillon a passé une semaine calme, du moins sur le plan des affaires. Certes son épouse Penelope a-t-elle été officiellement mise en examen mardi 28 mars, mais cette nouvelle était attendue et, comme cela avait été le cas pour François Fillon lui-même voici deux semaines, elle n’a pas provoqué de nouveaux remous dans la campagne.
Aucune nouvelle « affaire » le concernant ne s’invitant sur le devant de la scène, François Fillon a pu se consacrer à sa campagne. En point de mire : poursuivre ses attaques contre le complot visant à l’abattre. Ainsi, lundi 27, six représentants LR ont écrit au procureur de Paris François Molins pour lui signaler des infractions commises par l’exécutif actuel et (d’après eux) révélées dans Bienvenue Place Beauvau. Police : les secrets inavouables d’un quinquennat, le livre que François Fillon avait cité lors de son passage à L’Émission politique pour accuser le président Hollande d’avoir mis en place un cabinet noir. Parmi les signataires de cette lettre : le président du groupe LR à l’Assemblée Christian Jacob, celui du groupe LR au Sénat Bruno Retailleau, la présidente de la région Île-de-France Valérie Pécresse, et l’ex-candidate à la primaire Nathalie Kosciusko-Morizet.
Au cours de ses déplacements, François Fillon a martelé ces accusations et aussi ciblé celui qu’il juge être son principal rival : Emmanuel Macron, qu’il a qualifié de supercherie et appelle désormais Emmanuel Hollande. Mais les sifflets de ses supporters ne se limitent pas à ses adversaires, les soutiens jugés trop tièdes peuvent également avoir leur part, comme cela a été le cas pour Christian Estrosi lors d’un discours qu’il prononçait vendredi à Toulon avant que François Fillon ne prenne la parole. Vexé par les huées, le président LR de la région PACA a réagi en rencontrant le lendemain … Emmanuel Macron, présent ce jour-là à Marseille pour l’un de ses meetings (cf. supra). Inutile de dire que cette entrevue a été très mal reçue par le camp Fillon.
Mardi 4 avril – Le second débat
Au cours d’une émission où Philippe Poutou s’est fait le plus remarquer, François Fillon a vécu une soirée plus agitée qu’il ne l’aurait souhaité. Si lui a voulu se faire discret, exploiter la parole quand elle lui était donnée (il semblait d’ailleurs sciemment accumuler du retard au temps de parole pour pouvoir le rattraper avec des tirades de deux à trois minutes sur des sujets porteurs là où les autres disposaient d’une minute trente) et ne pas partir à l’offensive pour ne pas faire se faire contrer, les autres candidats (surtout les « petits ») ne l’ont pas entendu de cette oreille et, contrairement au premier débat, les prises à parties sur ses affaires et son bilan de Premier ministre ont fusé.
Face à cette situation, son positionnement et ses autres sorties ont évidemment été reléguées au second plan, d’autant plus qu’ils ne comportaient pas de nouveautés, le candidat LR affichant sa cohérence en continuant de garder son attitude de père-la-rigueur soucieux de couper les dépenses et réduire la dette pour éviter que le pays n’aille à la faillite. Dans sa conclusion, il a réitéré la nécessité d’une alternance politique et affirmé qu’il était le seul à en offrir une qui soit pourvue d’une vraie majorité.
Le résumé complet du second débat
Sondages au 7 avril
La dernière fournée de l’enquête CEVIPOF maintient Emmanuel Macron et Marine Le Pen nettement devant les autres participants, avec cependant une érosion nette pour la candidate FN, laquelle perd deux points par rapport à l’enquête de début mars et passe de 27% à 25%, au même niveau que Macron qui reste quant à lui stable. Derrière, François Fillon ne baisse plus mais ne repart pas non plus et voit Jean-Luc Mélenchon, qui profite d’une bonne dynamique, se rapprocher de lui. Benoît Hamon en revanche chute lourdement et n’est plus qu’à 10%.
De son côté, le sondage quotidien publié par Ifop-Fiducial montre des tendances plus marquées, avec tant Macron que Fillon s’érodant, et Fillon et surtout Mélenchon partant à la hausse. Signe pour le candidat LR que l’écart avec le duo de tête est appelé à se resserrer de manière substantielle d’ici le 23 avril, ou correction limitée d’un électorat de droite resserrant un peu les rangs malgré les affaires ? Quant au candidat France insoumise, il est en train de clairement gagner sa « primaire » avec Benoît Hamon. Jusqu’à quel point peut-il continuer de capter les électeurs du socialiste, voire attirer des électeurs de gauche tentés par Macron ? La simple agrégation de ses sondages et de ceux de Hamon le placerait en tout cas en position d’atteindre le second tour, sachant toutefois qu’un tel report n’a rien d’automatique ni ne sera total.
Semaine du 3 au 9 avril
Faits saillants de la campagne : le second débat a lieu ; les sondages montrent un tassement de Le Pen et Macron et une hausse (nette) de Mélenchon ; une attaque chimique contre un village rebelle syrien entraîne une réaction des Etats-Unis qui bombardent une base de Bachar el-Assad. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : pour François Fillon, le rebond est pour l’instant limité : il n’apparaît pas dans l’enquête du Cevipof publiée le 3 avril, et n’est que d’un point (c.-à-d. largement dans la marge d’erreur) dans celle du vendredi 7 mars de l’IFOP comparé à l’estimation faite sept jours auparavant. Néanmoins, le candidat LR veut y voir un signe : il cesse de reculer, l’électorat de droite se ressoude autour de lui, et les Français comprennent qu’il est le seul à pouvoir redresser la France avec un programme réaliste et une majorité parlementaire réelle. Tel est en tout cas le message véhiculé par celui qui évoque à l’envi un « vote caché », ces électeurs qui, pour diverses raisons, ne disent pas aux sondeurs qu’ils voteront pour lui.
François Fillon insiste donc et continue de jouer avec toutes les cartes qu’il lui reste, celle du complot notamment, évoquant notamment à propos des affaires qui le touchent une « opération montée de toute pièces » et affirmant qu’il détient les noms de ceux qui ont communiqué les documents à l’origine des poursuites dont il fait l’objet. Dans le viseur : encore et toujours l’Elysée. De son côté, le PNF a indiqué qu’il n’entendait pas mener d’enquête sur un éventuel cabinet noir, estimant trop imprécises les informations reprises dans le livre Bienvenue place Beauvau que Fillon tente d’exploiter (cf. son passage à L’Émission politique du 23 mars).
Sur le terrain, Fillon accélère une campagne, qui a retrouvé un rythme plus ou moins normal, quoique non-exempt d’anicroches, tel ce jet de farine qui l’a recouvert de blanc jeudi, juste avant un meeting à Strasbourg. Autre prise à partie vécue cette semaine : la tirade que le candidat LR a reçu de Philippe Poutou lors du second débat mardi sur BFM TV et CNews. La sortie du candidat NPA a été virulente et a eu son petit effet, même si bien malin qui peut dire comment (et si) elle va peser. En tout cas, de son côté, Fillon n’a pas hésité le lendemain à s’en servir pour se poser en victime et montrer son courage, affirmant voir quotidiennement depuis deux mois et demi « des torrents de boue [être] déversés » sur lui, et, malgré tout, être « encore là ».
Dimanche, ce même Fillon tenait Porte de Versailles son grand meeting de campagne. L’assistance ? Entre 20 et 25 000 personnes. Parmi elles, tous les ténors de la droite, ou presque, Sarkozy et Juppé n’étant pas là, mais ayant toutefois chacun appelé vendredi à voter sans ambiguïtés en faveur du vainqueur de la primaire de la droite. Autre absent : Christian Estrosi, le maire de Nice, dont la rencontre avec Macron il y a une semaine a créé un froid entre lui et son parti. Pour François Fillon, peu importe qu’il soit là ou pas, priorité à son discours, dans lequel il tape sur Macron (le candidat en « marche arrière ») et sur Mélenchon (« Il se rêve en capitaine du cuirassé Potemkine mais négociera la ferraille du Titanic »). Il se fait également grave au moment d’évoquer l’Europe, affirmant que celle-ci est à un tournant, et, face aux risques de guerre qu’il prévoit, se présente comme l’homme de la paix. Dans un autre registre, il se présente aussi, dans une anaphore digne de François Hollande et déjà testée lors du second débat, comme un président « exemplaire », parce que ne se laissant pas intimider ni par la calomnie, ni par les pressions.
En conclusion, François Fillon reste gonflé à bloc et demande aux Français non pas de « [l’]aimer », mais de le « soutenir ». Il lui reste moins de quinze jours pour parvenir à les convaincre nombre suffisant pour atteindre le second tour.
Sondages au 14 avril
Le sondage quotidien publié par Ifop-Fiducial maintient les tendances observées ces dernières semaines, à savoir un rapprochement continu de Fillon et Mélenchon par rapport à Le Pen et Macron. Si l’écart entre le premier (Le Pen) et le quatrième (Mélenchon) était encore de 7,5 points il y a une semaine, il n’est maintenant plus que de 4 points et laisse plus que jamais ouverte la possibilité d’un renversement de situation.
Publié ce vendredi 14, un sondage Ipsos pour Le Monde confirme ce resserrement et le réduit même à trois points (Le Pen et Macron à égalité à 22%, Mélenchon troisième à 20% et Fillon quatrième à 19%). Moins catégorique est en revanche l’enquête PrésiTrack d’OpinionWay / ORPI, pour qui Fillon (20%) seul est en mesure de contester une finale Le Pen-Macron (23% et 22%), Mélenchon étant placé plus en retrait (17%).
De son côté, Benoît Hamon est annoncé entre 7% et 9%, tandis que Dupont-Aignan tourne toujours autour de 4%.
Semaine du 10 au 16 avril
Faits saillants de la campagne : les sondages continuent de se resserrer, le match à quatre entre Macron, Le Pen, Fillon et Mélenchon pour atteindre le second tour est confirmé. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : alors que dans ses meetings il frappe tous azimuts sur Macron et Mélenchon, François Fillon voit les affaires qui lui ont tant nui continuer à projeter des étincelles. La première est venue de Mediapart, qui a révélé que, contrairement à ce qui avait été affirmé jusqu’ici, Penelope Fillon n’était pas rémunérée par l’Assemblée nationale depuis 1986, mais depuis 1982. Le Canard enchaîné en rajoute une couche mercredi en affirmant de son côté que la période suspecte pourrait même démarrer plus tôt encore, à partir de 1980. En tant que telles, ces informations ne changent pas la donne, mais contribuent à entretenir une petite musique sulfureuse autour du candidat LR, lequel entend désormais ne plus répondre aux questions relatives à ce scandale. Robert Bourgi en revanche se fait plus bavard et déclare à Mediapart avoir subi des pressions pour ne pas qu’il révèle être la personne ayant offert les coûteux costumes que Fillon a reçus en cadeau. En parallèle, une rumeur se met à circuler concernant ces fameux vêtements : alors qu’il a affirmé les avoir rendus suite au scandale, il se murmure désormais que le candidat LR en aurait en fait rendus d’autres et conservé pour lui les costumes incriminés …
Dans le même temps, les incidents concernant des journalistes se poursuivent. Après Mediapart et le Canard enchaîné, c’est au tour de la rédaction du JDD de se voir adresser des menaces de mort (un courrier inquiétant auquel est joint une balle d’arme à feu). Dans les meetings aussi, l’ambiance est tendue : des journalistes de Canal+ et TMC ont porté plainte à la police après avoir été pris à partie lors de l’événement de la Porte de Versailles de dimanche passé, notamment, dans le cas de Canal+, suite à une intervention musclée du service de sécurité. L’entourage de François Fillon a présenté ses excuses pour ce dérapage.
Dans un registre plus politique, François Fillon déclare en fin de semaine ne pas exclure d’intégrer dans son éventuel gouvernement des membres de l’association Sens commun, laquelle est impliquée dans sa campagne depuis le début et a notamment joué un rôle central dans l’organisation du meeting du Trocadéro. Une telle remarque est évidemment aussitôt interprétée comme un message clair envoyé à l’électorat catholique conservateur, dont Sens commun est considéré comme un représentant.
Sondages au 21 avril
La dernière livraison du sondage CEVIPOF-IPSOS-Storia-Steria (publiée le mercredi 19 avril) confirme les tendances observées dans d’autres sondages, à savoir la montée de Mélenchon et Fillon, et le tassement de Le Pen et Macron.
De son côté, dans son rolling quotidien, Ifop-Fiducial confirme cet avantage à Le Pen et Macron en montrant que la dynamique en faveur de Fillon et surtout Mélenchon s’est arrêtée cette semaine, de sorte que ces candidats ne franchissent pas la barre des 20% d’intention de vote chez cet institut non plus.
Bref, si la partie demeure serrée (les écarts sont dans les marges d’erreur, au moins en ce qui concerne Le Pen, Fillon et Mélenchon) et si un renversement de situation de dernière minute n’est pas à exclure (sachant que CEVIPOF estime que 25 à 30% des sondés sont encore susceptibles de changer d’avis), Macron et Le Pen gardent la faveur des pronostics. Quant à l’abstention, CEVIPOF estime qu’elle sera autour de 28%.
Pour ce qui est du second tour, Macron est donné (nettement) vainqueur face à n’importe quel opposant et Marine Le Pen perdante contre tous. En cas d’affrontement Mélenchon-Fillon, c’est le premier cité qui l’emporterait 58 à 42 (source : CEVIPOF).
Semaine du 17 au 22 avril
Faits saillants de la campagne : la dernière semaine avant le premier tour a été marquée par des débats sur le vote utile, ainsi que par un attentat terroriste perpétré sur les Champs-Élysées (un policier tué, deux blessés) alors que les candidats étaient tous en plateau sur France 2. Le résumé complet de la semaine
Faits saillants concernant le candidat : en meeting à Nice lundi 17, François Fillon a beaucoup joué la carte de la sécurité et de l’identité française, à laquelle il a réitéré son attachement. A ce meeting figurait Christian Estrosi (le régional de l’étape), en dépit des dissensions entre les deux hommes depuis plusieurs semaines, notamment lorsque Estrosi avait reçu Macron en visite à Marseille.
La stratégie du rassemblement (fut-il de façade) s’est aussi manifestée mercredi par une visite dans les locaux de l’entreprise Deezer en compagnie d’Alain Juppé. Les divergences entre les deux anciens adversaires à la primaire de droite sont de notoriété publique, mais Juppé a accepté de les mettre de côté pour réaffirmer son soutien au candidat des Républicains. A noter que cette visite commune devait initialement avoir lieu à l’école 42 (un établissement d’enseignement informatique fondé notamment par Xavier Niel), mais a été annulée en raison de rumeurs annonçant que certains étudiants entendaient accueillir François Fillon avec des messages du genre Rends l’argent.
Dans un autre registre, François Fillon se fait remarquer en refusant un entretien au Monde parce que celui-ci refusait de garantir qu’aucune question ne serait posée sur les affaires. Pour se justifier, François Fillon a déclaré que ce ne sont pas « les médias qui décident du tempo, qui décident des questions, qui décident de la campagne ». Avant ce refus, le candidat LR avait également refusé de se rendre chez Jean-Claude Bourdin sur RMC.
Jeudi soir sur France 2, Fillon passe après l’annonce de l’attaque sur les Champs et affirme faire de la lutte contre le terrorisme sa priorité absolue. Au passage, il annonce annuler les déplacements qu’il avait prévus pour le lendemain.
Enfin, concernant le Penelopegate et ses ramifications, un démenti : les costumes rendus étaient bel et bien ceux que François Fillon s’était fait offrir en février et pas d’autres plus anciens. Robert Bourgi, le généreux ami à l’origine de ces cadeaux, avait laissé entendre le contraire la semaine passée, mais les enquêteurs ont obtenu la confirmation inverse auprès de la maison Arnys qui a confectionné ces habits.
Concernant sa prestation lors de l’émission de France 2 du jeudi 20 avril : François Fillon déclare ne pas avoir apporté d’objet (une demande des journalistes à chaque candidat) car il n’est pas fétichiste, et que, compte tenu de ce qu’il s’est passé ce soir, il veut directement porter le débat sur ces événements et le terrorisme, ajoutant que, au vu de la situation (il évoque des incidents encore en cours dans Paris, alors qu’à aucun moment aucune information à ce sujet n’a circulé), il annule ses déplacements prévus pour vendredi. Une bonne partie de son entretien se passera sur ces questions, avant que ne soient abordés ses projets en matière de santé, de réforme de la fonction publique et des redressements des finances, mais absolument jamais les affaires qui l’accablent et ont pourri sa campagne.
23 avril – Résultats du 1er tour
Abstention : avec 22,2%, elle a été beaucoup moins forte qu’annoncé puisqu’elle n’est que 1,5% supérieure à celle de 2012, et reste loin du « record » de 2002 (28,4%).
Pas de surprises cette fois, les résultats annoncés correspondent à ce que les sondages pronostiquaient, tant au niveau des scores atteints que de l’ordre d’arrivée des candidats. Ainsi, Emmanuel Macron vire en tête du premier tour avec 24,0% et est en passe de devenir le plus jeune président de l’histoire de France. Les augures pour le second tour lui sont en effet largement favorables face à une Marine Le Pen qui certes, comme son père quinze auparavant, passe le premier tour de la présidentielle (qui plus est avec un record de voix pour l’extrême-droite), mais à la deuxième place seulement, et avec un pourcentage de suffrages nettement inférieure aux 25-30% que son camp escomptait afin d’avoir une dynamique intéressante pour le second tour. Ici, avec à peine 21,3% des votes, c’est une probable lourde défaite qui s’annonce pour la candidate FN.
Troisième avec 20,0% des suffrages (à 1,3% de Marine Le Pen), François Fillon échoue à accomplir la remontée-surprise qu’il annonçait depuis des semaines. Pour lui, pas de vote caché ni de retour en dernière minute de partisans que les affaires ont rebutés : celui qui était devenu le grand favori du scrutin au lendemain de sa victoire à la primaire de droite finit là où les sondages l’attendaient depuis la révélation du Penelopegate, perdant ainsi une élections que la droite jugeait voici trois mois encore comme « imperdable ». Concernant le second tour, François Fillon annonce qu’il votera à titre personnel pour Macron
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