1er débat (13 octobre, Las Vegas, Nevada) : où Sanders refuse d’attaquer Clinton sur ses emails
2e débat (14 novembre, Des Moines, Iowa) : où les attentats de Paris bouleversent la campagne
4e débat (17 janvier, Charleston, Caroline du Sud) : où Sanders commence à lâcher ses coups
5e débat (4 février, Durham, New Hampshire) : où les redites sont multiples
6e débat (11 février, Milwaukee, Wisconsin) : où il n’y a pas grand-chose de neuf
7e débat (6 mars, Flint, Michigan) : où Clinton et Sanders se mettent taquet sur taquet
8e débat (9 mars, Miami, Floride) : où l’immigration clandestine est au premier plan
9e débat (14 avril, New York) : où Sanders malmène Clinton avant New York
1er débat (13 octobre, Las Vegas, Nevada) : où Sanders refuse d’attaquer Clinton sur ses emails
Les observateurs sont (quasi) unanimes : parmi les cinq en piste ce soir-là (Clinton, Sanders, O’Malley, Chafee et Webb), Clinton est la gagnante du débat. L’ex-Secrétaire d’État s’est bien sortie des sujets la mettant sur la sellette, a été chaleureuse voire drôle, s’est démarquée par sa maîtrise de tous les dossiers et s’est positionnée comme une libérale pragmatique. Quant à l’affaire des emails, elle a pu compter sur le soutien (ambivalent ?) de Sanders (« The American people are sick and tired of hearing about your damn emails »), celui-ci refusant d’exploiter le scandale et affirmant que cela n’était pas une question importante pour le peuple américain.
Cette intervention de Sanders a été symptomatique de la différence d’ambiance avec les débats républicains : les démocrates ne sont pas dans une lutte à mort les uns envers les autres, leurs positions sont (relativement) peu éloignées, ou en tout cas ne se démarquent pas de manière aussi tranchées que dans le camp d’en face. A défaut de parfaite unité, c’est un sentiment d’union et d’approche constructive qui ressort pour l’instant des échanges.
Passionné, Sanders est néanmoins apparu en deçà de Clinton, pour trois raisons : d’abord son style, monophasé, sur un ton énervé où pointent colère et irascibilité (ce à quoi il aurait beau jeu de répondre que les conditions de vie du peuple américain ont de quoi mettre en colère quiconque de sensé) ; ensuite, des positions peu claires et peu probantes sur le port d’armes ; enfin, les taquets discrets assénés par Clinton alors que lui refusait d’entrer de ce genre de jeux, ce qui est tout à son honneur mais le plaça parfois en position de faiblesse face à une adversaire dotée de ce qu’il faut de perfidie (ou de malice, comme on voudra) pour porter des coups l’air de rien.
2e débat (14 novembre, Des Moines, Iowa) : où les attentats de Paris bouleversent la campagne
Les attaques terroristes qui ont eu lieu à Paris vingt-quatre heures plus tôt modifient la donne de ce débat, dont la première demi-heure est intégralement consacrée à la politique étrangère et la sécurité nationale. Sur scène, ils ne sont plus que trois, Webb et Chafee s’étant retirés et Biden ayant confirmé sa non-participation à la présidentielle.
De manière prévisible, Clinton a régulièrement été sous le double feu de Sanders et O’Malley qui la malmenèrent sur son vote en faveur de la guerre en Iraq et ses relations avec Wall Street. Bien qu’habituée à ce genre de situation et à éluder plus ou moins adroitement les sujets gênants, la candidate n’a pas toujours convaincu dans ses réponses, surtout lorsqu’elle invoqua son action après le 11 septembre pour justifier les millions de dollars de dons qu’elle reçoit aujourd’hui de la part du monde de la finance.
Sanders a répété son credo (révolution démocratique, rupture avec Wall Street, interventionnisme raisonné, sécurité sociale pour tous …) et été plutôt bons, avec quelques traits d’humour pince-sans-rire qui atténuent son style toujours un peu vindicatif. L’écart sondagier avec Clinton sera sans doute trop grand pour être comblé, mais le sénateur du Vermont apporte une vraie fraîcheur aux débats, ainsi que des idées qui n’ont d’ordinaire que peu d’échos aux Etats-Unis.
3e débat (19 décembre, Goffstown, New Hampshire) : où Sanders creuse son sillon et Clinton est dans un fauteuil
Clinton dans un fauteuil. La candidate est de plus en plus à l’aise dans l’exercice, n’est pas déstabilisée par les tentatives de la mettre en difficulté (souvent autour des mêmes thèmes), gagne en naturel et s’offre plusieurs traits d’humour (dont un « May the force be with you » pour conclure, en référence au nouvel épisode de Star Wars qui sort maintenant sur les écrans). Unique couac : un retour tardif sur scène après la pause (une histoire de … toilettes occupées !). Pour le reste, elle se pose en rassembleuse et souligne régulièrement les points de convergence avec Sanders et O’Malley, et se projette déjà en partie dans l’étape suivante en tapant sur Trump et en annonçant la fin des temps si un républicain devenait le prochain président.
Quant à Sanders, il a été dans la continuité de ses sorties précédentes (appel à une révolution, à contrer Wall Street, à faire payer les milliardaires …) et a confirmé son image d’homme intègre en prenant ses responsabilités dans l’affaire du « data breach ».
4e débat (17 janvier, Charleston, Caroline du Sud) : où Sanders commence à lâcher ses coups
C’est le dernier débat côté démocrate avant l’ouverture des primaires en Iowa et dans le New Hampshire. Niveau sondages, la dynamique a sensiblement évolué ces dernières semaines avec un Bernie Sanders en pleine accélération qui creuse un peu l’écart dans le New Hampshire, est donné dans un mouchoir de poche avec Clinton en Iowa, et est passé de 30% d’intentions de vote au niveau national à 40% en une quinzaine de jours.
Le débat a été plus animé que les précédents. Si le ton des candidats est resté courtois et fraternel, Clinton n’en a pas moins porté des charges appuyées à l’encontre de Sanders. Ses angles d’attaque : les positions de son rival en ce qui concerne les armes à feu ainsi que le financement de son programme en matière de soins de santé. Elle lui a également reproché de ne pas montrer assez de considération pour les accomplissements réalisés par Obama (dont elle se pose comme la continuatrice) et, avec ses projets, de prendre le risque de mettre à mal les acquis obtenus depuis 2009 (notamment l’Obamacare) au lieu de poursuivre et amplifier ce qui est bâti. Enfin, elle lia (perfidement) le sénateur du Vermont avec la crise financière de 2008.
Sanders n’a pas été décontenancé et a répondu sans animosité, se défendant d’être à la solde de la NRA et expliquant vouloir financer son programme social en taxant Wall Street et la spéculation financière, avant de se montrer à son tour offensif en pointant les relations entre sa rivale et Goldman Sachs (« you’ve received over $600,000 in speaking fees from Goldman Sachs in one year »). Fidèle à sa ligne de conduite, il refusa en revanche de l’attaquer sur d’autres sujets (par exemple lorsque la modératrice l’interrogea sur Bill Clinton). Parallèlement, il continua de mettre en avant les thèmes qu’il défend depuis plusieurs mois : le système politique corrompu par les Super PACs, les lobbys de Wall Street, la nécessité d’une révolution politique qui rende l’Amérique à tous ses citoyens, etc.
5e débat (4 février, Durham, New Hampshire) : où les redites sont multiples
Alors que Clinton et Sanders sont désormais seul en piste (O’Malley s’est retiré de la campagne après son maigre résultat en Iowa, où Clinton et Sanders ont fini au coude-à-coude), la soirée a été le théâtre de nombreuses redites par rapport aux débats précédents : Clinton avec « mon bilan, mon bilan » et « j’ai un plan, j’ai un plan » ; Sanders avec sa « révolution » et « le système est corrompu » ; Clinton et la confiance qu’Obama a témoignée à son égard (notamment dans le cas Ben Laden) ; Sanders et le vote de Clinton en faveur de l’intervention en Iraq en 2002 ; Clinton sur Sanders qui veut remettre en question les acquis des années Obama ; Clinton promouvant ses qualités pragmatiques (« je suis réaliste, je ne promets pas l’impossible ») ; Sanders réclamant la réinstauration d’un Glass-Steagall Act ; etc. Une exception notable à ces répétitions : la problématique du port d’armes, qui n’a cette fois pas été évoqué.
Sur le débat en lui-même, Clinton est apparue comme la gagnante morale de la soirée en prenant à trois reprises l’ascendant sur son rival :
- d’abord, en lançant à Sanders une mise en demeure : que celui-ci cesse d’insinuer qu’elle est au service des grandes entreprises, ou alors, s’il a quelque chose de précis à dire, qu’il le dise. Sanders a répondu en reprenant sa litanie de récriminations contre Wall Street, mais sans évoquer sa rivale.
- ensuite, en soulignant l’inexpérience et l’impréparation de Sanders en matière de politique étrangère, mettant ainsi en cause sa capacité à être commandant-en-chef.
- enfin, en déniant ne pas être « assez progressiste » (critique reprise à l’envi par Sanders et ses partisans), ajoutant que, vu les critères que le sénateur du Vermont emploie pour juger le degré de progressisme des gens, personne, pas même lui, n’est en mesure de se voir décerner un tel brevet.
6e débat (11 février, Milwaukee, Wisconsin) : où il n’y a pas grand-chose de neuf
Pas de grosse sensation dans ce débat ayant lieu juste après la victoire de Sanders dans le New Hampshire. Clinton a confirmé être meilleure que le sénateur du Vermont dans ce genre d’exercice et a marqué quelques points, notamment en se référant souvent à Barack Obama, dont elle soutient l’œuvre presque sans réserve, au contraire de (s’est-elle attaché à démontrer) son rival, lequel qualifia cette attaque de coup bas (« low blow ») avant de rappeler son amitié avec le président.
7e débat (6 mars, Flint, Michigan) : où Clinton et Sanders se mettent taquet sur taquet
Alors que Clinton a fait le break dans la course à l’investiture en dominant nettement son rival lors du premier Super Tuesday, le débat du jour se déroule dans le Michigan (où a lieu le scrutin mardi prochain), plus précisément à Flint, une ville défavorisée récemment mise sous les feux de l’actualité en raison de la contamination majeure au plomb de son réseau de distribution d’eau.
Continuant à appuyer sur ses angles d’approche habituels, Sanders s’est montré offensif et a lâché plusieurs attaques appuyées. Ainsi, après une première demi-heure consacrée à la situation de Flint et les mesures préconisées par les deux candidats pour la résoudre, Sanders attaque et déclare que Clinton a soutenu chacun des accords commerciaux désastreux qui ont provoqué la délocalisation de tant d’emplois. Clinton contre en affirmant que Sanders était opposé au sauvetage de l’industrie automobile menée par Obama en 2009, et Sanders réplique en évoquant le sauvetage la même année des banques de Wall Street, où travaillent « certains [des amis de Clinton], ceux qui ont détruit l’économie américaine … ». Clinton veut l’interrompre. « Excuse me, I’m talking » la coupe sèchement Sanders qui en remet ensuite une couche en l’accusant d’avoir voté tous les accords commerciaux néfastes pour le pays.
Plus tard, Sanders attaque à nouveau sa rivale sur ses relations avec le monde de l’argent et l’enjoint de publier la retranscription des conférences qu’elle a données à Goldman Sachs contre forte rétribution.
8e débat (9 mars, Miami, Floride) : où l’immigration clandestine est au premier plan
Si Clinton garde une avance confortable en termes de délégués, la victoire-surprise de Sanders au Michigan (« one of the greatest upsets in modern political history » selon le site en vue FiveThirtyEight) montre que son discours sur les effets dévastateurs des traités de libre-échange en matière d’emplois est en train de porter. En Floride toutefois (où aura lieu l’un des scrutins les plus importants du second Super Tuesday), c’est surtout l’immigration qui est en tête des préoccupations et occupe une large part du débat.
Ainsi, une grosse passe d’armes a lieu sur les votes passés de Sanders sur ce sujet, notamment son vote contre un projet de loi poussé par Ted Kennedy en 2007 qui, d’après Clinton, s’il avait été adopté, aurait résolu bien des problèmes en cours aujourd’hui. Sanders rétorque que la partie concernant les « guestworkers » (travailleurs invités) s’apparentait à de l’esclavage et que c’est pour cette raison qu’il s’est opposé à ce projet de loi. Clinton ne lâche pas le morceau et en appelle à tous les démocrates et toutes les organisations qui l’ont soutenu. Sanders contre en évoquant des enfants venus du Honduras que Clinton voulait renvoyer. Celle-ci trouve l’attaque injuste et renvoie à Sanders un vote en 2006 par lequel il se serait retrouvé aligné avec des républicains hardcore en ce qui concerne le traitement des illégaux. Outré, Sanders dénonce la manœuvre de sa rivale.
9e débat (14 avril, New York) : où Sanders malmène Clinton avant New York
Les dernières semaines ont permis au sénateur du Vermont de remporter huit succès d’affilée et de se replacer (un peu) dans la course à l’investiture. Il reste néanmoins à distance respectable de sa rivale, laquelle domine en outre de dix à quinze point les sondages concernant l’important État de New York. Les bons résultats récents de Sanders lui ont toutefois permis d’obtenir qu’y soit organisé un nouveau débat, le premier chez les démocrates depuis un mois.
Au terme de la soirée, Sanders a remporté une victoire aux points. Il s’est montré pugnace du début à la fin et a malmené une adversaire par moments peu convaincantes, mais qui n’a pas non plus connu de trous d’air majeurs. A noter que, malgré une tension palpable, le débat est toujours resté poli et courtois.
Sanders ouvre le bal en déclarant ne pas remettre en cause l’intelligence de Clinton mais son jugement et égrène à la liste des reproches qu’il lui fait : la guerre en Irak, les accords de libre-échange, les Super PACs, la connivence avec Wall Street. Sur ce dernier point, Sanders est mis en difficulté quand un journaliste lui demande des exemples concrets de cette connivence et qu’il répond de manière vague.
Autre sujet à avoir occupé la conversation : les conférences de Clinton à Goldman Sachs. La candidate démocrate refuse toujours d’en publier la retranscription et donne l’impression qu’il doit vraiment y avoir quelques choses de dérangeant dans les discours qu’elle a prononcés pour qu’elle s’obstine ainsi à ne pas vouloir les publier, qui plus est en recourant à des arguments aussi fallacieux que ceux qu’elle avance.
Puis c’est au tour de Clinton de mener l’offensive. Après s’être posée en farouche partisane d’un salaire minimum à $15/heure (Sanders manquant de s’étrangler en l’entendant affirmer qu’elle a toujours défendu cette position), elle attaque à nouveau le sénateur du Vermont sur la question du droit au port d’armes.
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