12 novembre – Après l’analyse des dynamiques de vote ayant fait basculer l’élection et celle ayant trait à l’impact des principaux thèmes et faits de la campagne, place au détail des votes dans cinq États-clefs de la présidentielle 2016 : la Floride, l’Ohio, le Michigan, la Pennsylvanie et le Wisconsin.

 

1. Floride

# Voix (millions) Démocrates Républicains Third Party Total
2016 4,49  (47,8%) 4,61 (49,1%) 0,30  (3,1%) 9,4
2012 4,23  (50,0%) 4,16  (49,1%) 0,10  (0,9%) 8,4

Par rapport aux autres États, la Floride fait figure d’exception dans le sens où le nombre de votants y a été sensiblement supérieur à 2012 (+10%, alors que, au niveau national, l’augmentation n’est que de 1%). Cet accroissement a cependant été très spécifique, puisqu’il n’a concerné que les classes aisées (plus de $50k/an de revenus), traditionnellement plus favorables aux républicains, tandis que la participation des classes à bas revenus a été estimée comme stable, voire en légère en baisse.

Dans ce contexte, la victoire de Donald Trump dans cet État tient avant tout à une meilleure mobilisation de son électorat de base, laquelle lui a permis d’empocher une victoire certes étroite, mais que même le report théorique de l’intégralité des voix de Jill Stein ne permet pas de contester (il y a 120 000 voix d’écart entre Trump et Clinton, et Stein n’en a que 60 000).

 

2. Ohio

# Voix (millions) Démocrates Républicains Third Party Total
2016 2,32  (45,5%) 2,78  (52,1%) 0,57  (4,4%) 5,67
2012 2,83  (50,7%)
2,67  (47,7%) 0,10  (1,6%) 5,59

La participation électorale en Ohio a été dans l’ensemble légèrement supérieure à 2012 (-2%). Les sondages à la sortie des urnes ont toutefois révélé une dynamique proche de celle observée en Floride, à savoir une démobilisation marquée des classes à bas revenus (lesquelles seraient passées de 45% à 38% des votants), alors que les classes à hauts revenus, elles, ont voté davantage.

En outre, à la différence de la Floride, la plupart des autres tendances observées au niveau national ont également remarquées en Ohio, à savoir un reflux massif des jeunes (moins de 40 ans) vis-à-vis de Clinton (leur vote serait passé de 59% en faveur des démocrates à 46%) et une baisse conséquente du vote des bas revenus pour les démocrates (surtout chez les hommes), cela au profit tant des républicains (un peu) que des candidats Third Party (davantage), tous ces éléments expliquant l’ampleur de la victoire acquise par Trump, que le gouverneur de l’État John Kasich avait pourtant ostensiblement refusé d’adouber.

 

3. Michigan

# Voix (millions) Démocrates Républicains Third Party Total
2016 2,26  (47,3%) 2,28  (47,6%) 0,22  (5,1%) 4,74
2012 2,56  (54,2%) 2,10  (44,7%) 0,05  (1,1%) 4,73

Ici, pas question de mobilisation moindre des classes à bas revenus comme en Floride ou en Ohio : elles ont bel et bien répondu présent, mais ont aussi substantiellement délaissé Clinton (les sondages indiquent que leurs suffrages pour les démocrates seraient passés de 62% à 53%), avec, comme bénéficiaire principal, le parti républicain (les suffrages en leur faveur dans ce segment de l’électorat serait passé de 36% à 42%).

A ce phénomène s’est ajouté un autre exode substantiel, celui des jeunes en faveur non pas de Trump, mais des candidats Third Party. Un exode aux conséquences ici vraisemblablement importantes, puisque les démocrates auraient (théoriquement) pu sauver cet État si les votes de Jill Stein s’étaient intégralement reportés sur Clinton (Stein en a recueillis 51 000 alors que le retard de Clinton sur Trump est de 14 000). De la même manière, une mobilisation aussi forte de la population noire que celle qui avait prévalu pour Obama aurait également pu faire office de joker pour les démocrates, lesquels s’en sortent avec une défaite humiliante et lourde de sens dans un État qu’ils n’auraient jamais dû lâcher (rappelons cependant que le sauvetage seul du Michigan ne leur aurait pas suffi pour inverser le verdict de l’élection).

En résumé, la victoire de Trump dans le Michigan a été clairement portée par le basculement en sa faveur de l’électorat à bas revenus (et principalement blanc), et finalisée grâce au vote des jeunes pour des candidats Third Party au détriment de Clinton.

 

4. Pennsylvanie

# Voix (millions) Démocrates Républicains Third Party Total
2016 2,82  (47,6%) 2,90  (48,8%) 0,19  (3,6%) 5,90
2012 2,99  (52,0%) 2,70  (46,6%) 0,08  (1,4%) 5,75

Le scénario observé en Pennsylvanie est semblable à celui décrit au Michigan, avec un transfert substantiel de votants masculins à bas revenus des démocrates vers les républicains (le vote démocrate dans la catégorie Moins de $50k/an de revenus passe de 67% à 54% !). Le facteur Third Party joue également, mais moins, le report théorique des 48 000 voix de Jill Stein ne suffisant pas à combler les 73 00 de retard de Clinton sur Trump (la Pennsylvanie étant d’ailleurs l’un des États où les candidats Third Party réalisent l’un de leurs scores parmi les plus bas).

 

5. Wisconsin

# Voix (millions) Démocrates Républicains Third Party Total
2016 1,38  (46,9%) 1,40  (47,9%) 0,14  (5,2%) 2,93
2012 1,62 (52,8%) 1,40 (45,9%) 0,04  (1,3%) 3,07

L’histoire est ici quasi la même qu’au Michigan, avec des démocrates qui voient une part substantiel des votants masculins à bas revenus les délaisser principalement pour les républicains (le vote démocrate dans la catégorie Moins de $50k/an de revenus passe de 62% à 49%, celui en faveur des républicains de 37% à 45%), mais aussi pour les candidats Third Party, dont Jill Stein, dont le report intégral théorique des voix (31 000) sur Clinton (qui accuse un retard de 28 000 votes sur Trump) aurait permis à cette dernière de sauver in extremis cet État (ce qui, ceteris paribus, n’aurait rien changé à l’élection de Donald Trump).

 

Les autres analyses du scrutin :  1. Les dynamiques qui ont fait basculer l’élection  –  2.  Impact des principaux thèmes et faits de campagne  –  3. Le détail des résultats

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